Depuis le début de la pandémie les chercheurs partagent leurs connaissances et publient beaucoup d’études. Toutes ne montrent pas un niveau de preuves élevées, cependant elles nous permettent de connaître de mieux en mieux la maladie. En ce qui concerne l’impact de la COVID 19 sur les femmes enceintes et leur nouveau-né, voici les dernières informations.
Evolution des connaissances concernant la transmission de la maman au bébé.
Une étude, d’une équipe parisienne, est parue le 14 juillet 2020 dans la revue Nature communication. Elle montre la transmission pendant la grossesse, pour un seul bébé né en mars 2020, en France.
Il s’agit de la première infection de ce type selon les médecins qui ont suivi la mère. Le bébé a eu des symptômes neurologiques, mais s’est rétabli en trois semaines et va bien. (https://doi.org/10.1038/s41467-020-17436-6)
En Italie, des chercheurs ont étudié 31 mères contaminées, ils ont trouvé, pour une mère, trace du virus dans le placenta, le cordon ombilical, le vagin et dans le lait maternel, mais aucun bébé n’est né positif au SARS-CoV-2, étude publiée dans le BMJ le 9 Juillet 2020. (https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2020.07.09.20149591v1.article-info)
Une étude menée aux Etats-Unis montre que les fœtus sont rarement infectés par le virus, car le placenta produirait de très faibles quantités du récepteur que le virus utilise pour pénétrer dans les cellules humaines. Etude publiée dans la revue eLife le 14 juillet 2020 (https://elifesciences.org/articles/58716)
Si la mère est infectée, la transmission dite « verticale », de la maman au bébé, est de l’ordre de 2% des grossesses. Pour ces bébés-là, les chercheurs pensent que le virus utilise peut-être une autre porte d’entrée, mais on ignore encore laquelle.
La cause pourrait être l’état inflammatoire des mamans COVID positif. Des équipes souhaitent comparer des échantillons placentaires mais aussi des prélèvements du sérum maternel de femmes enceintes, positives ou non au SARS-CoV-2. Cela permettrait de suivre l’état inflammatoire du placenta et de savoir s’il est « endommagé » et ne protège plus l’enfant.
Ces travaux permettraient de prévoir de potentiels effets sur la santé des bébés qui naîtront dans les prochains mois, alors que leur mère aura été infectée pendant les premiers mois de la grossesse.
Concernant l’allaitement maternel, il est plutôt encouragé si la maman le souhaite. En effet les nombreuses données sur l’allaitement et la Covid-19 ne montrent aucun cas de transmission de l’infection par l’allaitement au sein. Sur une vingtaine de prélèvements, le virus n’a été retrouvé dans le lait que dans un cas, positif 24 heures après la naissance, puis négatif au 3ème jour.
Le risque de contamination du bébé semble d’avantage lié à la proximité avec sa maman infectée. L’allaitement est possible en respectant quelques précautions standard, port d’un masque et lavage fréquent et soigneux des mains.
La surveillance de la maman durant la grossesse et la naissance.
On sait que les femmes enceintes sont particulièrement sensibles aux infections pulmonaires, exemple la grippe. En effet, surtout au 3ème trimestre de la grossesse, elles présentent des modifications :
- Anatomiques = élévation du diaphragme.
- Histologiques = œdème de la muqueuse des voies respiratoires.
- Métaboliques = augmentation de la consommation d’oxygène.
- Physiologiques = système immunitaire plus vulnérable aux infections.
C’est pour cette raison que la Haute Autorité de Santé (HAS) a mis les femmes enceintes dans les populations à risque pour la COVID 19. Aujourd’hui, grâce aux observations des femmes enceintes ayant contracté le virus, il apparaît qu’elles et leur enfant à naître, ne soient pas particulièrement susceptibles de développer’ des formes sévères de Covid 19.
Cependant, par précaution, le Collège National des Gynécologues Obstétriciens Français (CNGOF) recommande d’adapter la prise en charge de la grossesse au contexte épidémique.
Il est ainsi conseillé aux femmes ne présentant pas de symptômes de la maladie d’appliquer rigoureusement les gestes barrière.
Le CNGOF recommande par ailleurs aux professionnels de suivre de très près les patientes atteintes par la Covid-19 durant la grossesse. Pour la plupart de ces patientes, l’accouchement et le suivi post-partum apparaissent toutefois très peu modifiés :
- L‘accouchement par voie basse reste possible.
- Le bébé n’est pas séparé de sa maman à la naissance.
- Le séjour en maternité n’est pas allongé, sauf si complications pour la maman ou le bébé.
Cependant, pour les patientes présentant une détresse respiratoire aiguë, une étude américaine montre un risque augmenté d’accouchement prématuré, et de recours à la césarienne, aucun des nouveau-nés n’a été testé positif au coronavirus COVID-19. Etude menée sur 64 femmes enceintes, atteintes d’une forme grave de COVID 19, hospitalisées dans 12 établissements américains entre le 5 mars 2020 et le 20 avril 2020, publiée le 8 mai 2020, dans (AJOG) American Journal of Obstetric and Gynecology (https://doi.org/10.1016/j.ajogmf.2020.100134)
Dans une étude parue dans le LANCET, un médecin de l’AP-HP préconise de ne pas tester systématiquement tous les nouveau-nés mais seulement ceux issus d’une famille comprenant des cas de Covid-19.
A la maternité, tout enfant né d’une maman infectée par le SARS-CoV-2 sera avec sa maman, écarté des autres enfants dans une chambre isolée et surveillé.
Les constats suite au confinement et à l’épidémie
Moins de bébés sont nés prématurément pendant le confinement
Dans plusieurs pays, des médecins ont remarqué une baisse du nombre de naissances prématurées pendant le confinement lié à l’épidémie de COVID 19.
En Irlande, le Pr Roy PHILIP, néonatologiste à la maternité universitaire de LIMERICK, et son équipe se lancent alors dans une étude comparative. Ils regardent le nombre de naissances prématurées, entre janvier et avril dans cette maternité depuis 2001, soit plus de 30 000 bébés.(https://www.medrxiv.org/content/10.1101/2020.06.03.20121442v1.full.pdf)
Les naissances de bébé pesant moins de 1 500gr
- De 2001 à 2019, représentaient 8‰ naissances.
- En 2020 représentent 2‰ naissances
Les naissances de bébé pesant moins de 1 000gr
- De 2001 à 2019, représentaient 3‰ naissances
- En 2020, il n’y a eu aucune naissance.
Une autre étude, menée indépendamment au Danemark, montre une chute importante des naissances de grands prématurés pour tout le pays. Le nombre de bébés nés avant 6 mois de grossesse a chuté de 90 %.
A Calgary, au Canada le nombre de naissances prématurées a été divisé par deux pendant le confinement. Même constat fait par les responsables du service pédiatrique du Mercy Hospital for Women de Melbourne (Australie), et le service de néonatalogie à Nashville (États-Unis).
Les hypothèses pour les chercheurs sont les aspects positifs du confinement. Les futures mamans à domicile n’avaient plus à prendre les transports en commun, elles avaient moins de charges lourdes à porter, elles avaient le stress du travail en moins. Le fait de moins sortir entraîne aussi une réduction du risque de contracter une infection, liée à la Covid-19 ou non. Enfin, le confinement a fait baisser la pollution atmosphérique qui a un impact sur la prématurité.
Il faudra s’intéresser à tous les pays, afin de savoir si cette baisse est la même partout. Pour l’heure, les scientifiques n’ont pas de réponse claire pour expliquer ce constat.
Plus de risque de dépressions postnatales.
En temps habituels, on estime que plus de 10% des mamans présentent une dépression postnatale, d’ailleurs souvent mésestimée. Voir sur notre site « Après la naissance prendre soin aussi de la maman »
Dans tous les pays on constate que la détresse psychologique chez les femmes enceintes est en hausse depuis le début de la pandémie de COVID-19.
Le stress lié à l’épidémie, l’isolement lié au confinement sont des éléments supplémentaires pouvant déclencher cette dépression. La peur d’être contaminée ou d’infecter son bébé, l’angoisse d’accoucher à l’hôpital avec des patients atteints de la Covid-19, un suivi de grossesse chamboulé, l’absence de séances de groupe de préparation à la naissance, des conditions d’accouchement inédites avec parfois l’absence du papa lors de la naissance, l’impossibilité de présenter son bébé à la famille, l’incapacité d’être aidée par la famille et l’entourage sont tous les éléments qui alertent les professionnels de la santé et les incitent à mieux entourer et informer les parents.
Une étude américaine réalisée par la Blue Cross Blue Shield Association, (Blue Cross Blue Shield Association est une fédération de 36 compagnies d’assurance maladie américaines distinctes qui fournissent une assurance santé aux États-Unis à plus de 106 millions de personnes.), établit un lien entre le coronavirus et l’augmentation constatée des cas de dépression post-partum. (https://www.bcbs.com/sites/default/files/file-attachments/health-of-america-report/HoA_Maternal_Health.pdf). Cette étude montre aussi que les inégalités sont encore augmentées par la crise de la COVID 19 et que les femmes pauvres afro américaines sont les plus à risque. On sait qu’un climat anxiogène et l’inquiétude quant à l’avenir renforcent le stress et les risques de dépression.
Cependant il est difficile de transposer la situation des Etats-Unis aux autres pays. En effet l’épidémie y est beaucoup plus sévère, d’autre part il n’y a pas eu d’aides financières à la population mise massivement au chômage, enfin l’accès aux soins et la couverture santé sont très différents de ceux mis en place en Europe par exemple.
Il faudra que des études soient faites dans d’autres pays, le vécu par les couples du suivi de la grossesse et de l’accouchement durant cette période fait aujourd’hui l’objet d’études.
Vous pouvez d’ailleurs répondre à une étude menée en France par le Centre Hospitalier de LE VINATIER intitulée :
- Dépistage et soin des douleurs psychiques de la mère et du bébé au 3ème mois après l’accouchement.
(https://bebeppi.limequery.com/182882?lang=en)
Il est important de rappeler que la dépression post-natale se soigne très bien. Elle doit être prise en charge le plus tôt possible pour le bien-être de la maman mais aussi le bon développement du nouveau-né. A noter que le papa peut aussi faire une dépréssion post-natale
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